bandeau de photos

Evaluation de la puissance d'une chute d'eau

Deux paramètres définissent la puissance d'une chute :


I - EVALUATION DU DEBIT

Si la mesure de la hauteur de la chute ne pose pas de problème, le débit d'eau transitant par la roue est un peu plus difficile à appréhender. Une méthode assez facile à mettre en œuvre donne toutefois des résultats satisfaisants :

le débit, ou quantité d'eau qui s'écoule en une seconde en un endroit donné, est le produit de la section d'écoulement de l'eau (largeur moyenne de la rivière multipliée par profondeur moyenne à l'emplacement de la chute) par la vitesse estimée d'écoulement, soit :

débit (en litres/seconde) = largeur (en mètres) X profondeur (en mètres) X vitesse (en mètres/seconde).


Ce dernier facteur, vitesse de l'eau en mètres par seconde, n'est pas toujours aisé à mesurer. Il faut avoir présents à l'esprit quelques ordres de grandeur.
Une rivière calme, de plaine , aura une vitesse d'écoulement d'eau d'environ 0,1 à 0,3 mètre/s. Pour une rivière à écoulement normal, on pourra prendre 0,4 à 0,5 mètre par seconde, alors qu'une rivière en crue peut atteindre 1 mètre /seconde. On peut compléter par l'indication d'une vitesse de 2 à 3 mètres/seconde pour un torrent de montagne.

Ex : la Sée à Brouains : On retiendra, à défaut de plus de précision, une vitesse de 0,5m/s, cas assez fréquemment rencontré dans nos rivières de notre région ; d'où, selon la formule ci-dessus : débit Q = largeur x profondeur x vitesse, on peut estimer approximativement le débit de la Sée à Brouains (largeur 3 mètres, profondeur 25 cm) : débit Q = 3 m x 0,25 m x 0,5 m/s = 0,375 m3/seconde soit 375 litres/seconde.


II - CALCUL DE LA PUISSANCE

La puissance est le produit du débit d'eau transitant par la chute, par la hauteur de chute. Sachant que, dans notre exemple de Brouains, la chute est mesurée à 3 mètres , on obtient une puissance P en kilogrammètres par seconde (unité non normalisée à ce jour mais bien plus pratique à manipuler que le newton-mètre par seconde) :

puissance (kg.m/s) = débit d'eau (L/s) X hauteur de chute (m)
P = 375 L/s x 3 m = 1 125 L.m/s. où, la masse volumique de l'eau étant 1 kg/L, P = 1 125 kg.m/s

L'unité de puissance couramment utilisée est le cheval-vapeur (ch), qui est à rapprocher de l'unité normalisée aujourd'hui le kilowatt (kW) ou le watt. Sachant que 1 cheval-vapeur est la puissance qui élèverait à 1 mètre de hauteur un poids de 75 kg en 1 seconde (1 ch = 75 kg.m/s, et 1kg.m/s = 1/75 ch), on obtient :

Puissance de la chute en ch = 1 125 kg.m/s x 1/75 = 15 ch.

Un cheval-vapeur valant 736 watts ou 0,736 kilowatt (1 ch = 0,736 kW) - on remarque qu'un ch est un peu plus petit qu'un kilowatt (environ les ¾) -, on arrive à P (en kilowatts) : P (en kW) = 15 ch x 0,736 = 11,04 kW ; on arrondit à P = 11 kW.


III - NOTION DE RENDEMENT

La puissance trouvée est une valeur théorique et ... administrative, pour calculer vos droits (fondés en titre), et vos impôts le cas échéant, mais en aucun cas, celle utilisable pour actionner vos meules, ou votre turbine. Il faut tenir compte en outre du rendement de l'installation : perte d'eau autour de la roue, frottements des arbres et engrenages, d'où parfois échauffement. Pour une roue et ses engrenages, il est commun de compter un rendement de 0,3/0,4, c'est-à-dire que pour 10 litres d'eau arrivant dans le coursier (10 litres d'eau " dépensés "), seuls 3 ou 4 serviront à animer les meules.

Si l'on reprend l'exemple du moulin de Brouains, en considérant un rendement de 0,33 (ou 1/3 pour simplifier) on obtient une puissance réelle utilisable : P = 15 ch x 1/3 = 5 ch (valeur courante permettant d'actionner deux paires de meules). Le rendement d'une turbine est sensiblement meilleur. En production d'électricité, on peut espérer un rendement double, soit environ 0,6/0,7 (il est illusoire d'espérer plus !).

En résumé, on retiendra un rendement moyen :

A titre d'information, une grande roue de 150 ch (théoriques), diamètre 11 mètres, largeur 6 mètres, installée sur la Marne vers 1870 afin d'alimenter Paris en eau potable par le canal de l'Ourq, et calculée par le célèbre ingénieur Sagebien, avait un rendement prouvé de 0,4. Il faut savoir que la ville de Paris a estimé judicieux d'investir dans la rénovation de ce moulin-pompe en 1980, et, qu'à ce jour, il fonctionne à moindre coût, n'en déplaise à tous les détracteurs de cette énergie douce et renouvelable qu'est l'eau.

Et que tournent nos moulins !

Lucien MARANDEAU